J'ai connu le temps des ouvreuses de cinéma. Celles qui déchiraient le billet à l'entrée, parfois même vous plaçait comme au théâtre si vous arriviez en retard à l'aide de leur petite lampe de poche. En ce temps-là, il y avait une première partie avec un court-métrage, puis les "actualités". Ensuite, l'entracte pendant lequel on visionnait des publicités. Certaines vous incitaient à aller vivement auprès d'une ouvreuse ou à l'intepeller pour qu'elle vienne près de votre place. Munie d'une corbeille rectangulaire en osier suspendue à son cou, elle vendait les fameux bonbons Krem*, les caramels Dupont d'Isign*, les esquimaux Gerva**, etc... Enfin venait le film. L'obscurité se rétablissait et l'ouvreuse disparaissait...
Edward Hopper - New York Movie - 1939
Celle de Hopper, dans sa tenue bleue électrique, semble attendre le client - rare - qui va descendre dans la salle obscure. La première partie est déjà commencée...
La caméra s'approche : Gros plan sur l'ouvreuse !
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Prochaine séance, lundi !
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Je me souviens
De cette salle paroissiale
Salle de cinéma
Dans ma campagne jolie
Même aérée toute la journée le jour-J
Je me souviens
De cette odeur
Des sièges recouverts de velours râpé rouge
Du bruit des dossiers à chaque arrivants
C'était la joie en moi
La fête quoi ...
Que de monde entassé
Une vague humaine
Multicolore
Pas de questionnement à l'époque sur le système de sécurité ...
Phubbing , personne en était atteint
Les villageois se parlaient
En ce lieu de rendez-vous hebdomadaire
Et soudain un silence subit ...
Le bruit de la bobine retentit
Les reflets dans la salle
Comme un nuage de poussière tourbillonnant ...
La p'tite lucarne juste éclairée
Et tout et tout...
En famille
Que du bonheur les soirs de cinéma
Et c'était l'occasion de m'endimancher
Sans oublier le gros noeud dans les cheveux pour faire oublier ma coupe au bol
Ma mère avait un bon coup de ciseaux .. c'était pas toujours une réussite
Avec ma soeur on ne rigolait pas pendant les séances coiffure d'Amélie
Je n'ai pas oublié l'entracte
Et quel délice
Stomboli glacé dégusté
Ah oui c'était l'bon temps
Chez nous à la campagne
A la bonne franquette
Pas d'ouvreuse
Mais quelle ambiance !
Et cette salle servait aussi pour les spectacles de fin d'année
Je l'aimais tant ce lieu
Je le garde chaudement enveloppé dans mon tiroir
Souvenirs d'enfance
De nos jours
Aller au cinéma ne me met plus en joie ...
Le crissement de papier
Les mandibules qui dévorent ces trucs à la mode
L'odeur de pâté d'un sandwich avalé dans le noir
Les gens qui pianottent nerveusement
Des mots saccadés dans une langue hachée
Et oui c'est aussi cela les aléas d'une vie trépidante certains soirs au cinéma
En ville ...!
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Contre-pieds de la trépidante vie actuelle
Nul besoin de mots
La nature parle douceur ...